Je ne crois pas trop aux règles de compositions, car les règles sont faites pour être dépassées… Il n’empêche qu’il n’est pas inutile de « connaitre ses classiques », ce qui permet de mieux explorer d’autres voies…
Sans devoir systématiquement repasser par ou d’autres sont déjà passé… Passons donc en revue quelques scénarios classiques de composition. Qu’il faudra mémoriser, utiliser, pour mieux les oublier ! Ne dit-on pas, que pour faire un grand peintre « il faut d’abord désapprendre à dessiner » ? Vous retrouverez ensuite dans une seconde partie (ici), quelques exemples de « vocabulaire formel » souvent utilisés en photographie.
Lire la suite : Prise de vue, quelques « figures imposées »…
Quelques évidences pour commencer…
La « règle des tiers » : commençons par la pire tarte à la crème, des tartes à la crème.
La règle des tiers, c’est le truc que l’on explique aux enfants qui apprennent à tenir un appareil photo pour la première§re fois ! C’est le truc que l’on explique à quelqu’un qui fait sans le vouloir des photos systématiquement penchées, ou cadrées n’importe comment. C’est le truc que l’on explique, lorsque l’on ne sait pas trop quoi dire d’autre…
Au final, respecter cette règle des tiers est probablement le meilleur moyen de « brider la créativité » d’un apprenti photographe. Personnellement c’est le truc auquel je ne pense jamais… Mais qui curieusement apparait dans beaucoup de mes photos, sans que je ne l’ai voulu ! Ce qui fini par m’énerver. A croire que notre oeil a été formaté « malgré nous » par la règle des tiers, après des siècles de peinture et d’images.
Si vous regardez bien : les meilleures photos n’obéissent pas souvent « exactement » à la règle des tiers. Parfois, les éléments principaux qui attirent l’oeil, sont « pas loin » des tiers. Mais jamais, « exactement aux tiers ». Comme sur ces exemples :
Le « chaos apparent »
Le principe ici, est exactement l’inverse de la règle des tiers : aucune structure lisible ne doit apparaître… Il y aura quelque chose de fascinant à rechercher des structures dans ce chaos, sans les trouver à coup sur. L’asymétrie, le déséquilibre, l’absence d’organisation et l’inattendu : c’est bien plus rigolo et intéressant que la règle des tiers !
Bien plus difficile aussi, car il faut tout de même trouver un « sens » aux formes. Car le « n’importe quoi », n’est pas très intéressant lui non plus… Créer un chaos « cohérent », qui retienne l’attention, est finalement assez difficile. D’ailleurs, je n’ai pas beaucoup d’exemples de « chaos intéressant » sous la main :
La « fausse symétrie »
Autre grand classique qui produit parfois des résultats, lorsque le hasard vous place en face d’une symétrie quasi parfaite. Il est alors difficile de ne pas chercher à l’utiliser… Mais faut-il chercher la symétrie parfaite ? Ou au contraire : l’éviter… de peu ? A vous de choisir, il me semble que la « fausse symétrie est bien plus amusante que la symétrie parfaite »…
La « frontalité »
C’est la fait d’être face à un sujet dont l’aspect frontal le transforme en « tableau à plat ». Un style de photo que l’on fait assez facilement (et même sans le vouloir parfois) avec de longues focales. Attention, c’est parfois un peu ennuyeux et répétitif (lorsqu’il n’y a pas de sujet). Mais parfois ça marche bien : notamment si la lumière, les couleurs et les formes sont de votre côté…
La « bascule »
J’aurais pu appeler ça le « penché », le « en travers », la « chute »… Ou tout simplement le « Déséquilibre ». Si il suffisait de pencher son appareil pour réussir des photos : ça se saurait. Pour autant s’il était interdit de pencher son appareil, ça serait dommage !
Pour aller plus loin…
La « touche de couleur »
Un classique là encore, on connait tous énormément d’exemples de ce genre d’images… Mais il faut aussi que le « sujet » soit là : il faut que l’image raconte quelque chose. Car l’impact d’une forme coloré, ne suffit pas à lui tout seul, pour faire une bonne image.
Les « fuyantes et perspectives »
Un élément formel, bien connu des photographes urbains… Plus votre focale est courte (grand angle), plus il est facile de jouer sur les lignes fuyantes et les perspectives…
Mais ce qui était surprenant dans les années 90 (époque à laquelle il était encore rare pour les photographes amateurs, de posséder des 14 ou des 20 mm)… est devenu un peu moins surprenant en 2018. Du coup, le risque est que « l’idée géniale » se transforme en « manière » : en artifice visuel un peu dénué de sens, à force de répétition. Ce qui arrive à chaque fois que l’on ne compte que sur un effet, pour réussir ses photos.
Le « hors cadre »
Un élément significatif sort du cadre et voilà une photo qui « bouge » et qui « s’anime »… Couper quelqu’un qui sort du cadre (parfois sans le faire exprès) ne signifie pas forcément une photo ratée. Le « hors cadre » apporte parfois ce caractère naturel et sur le vif, qui rend les photos vivantes et dynamiques… Dans cette image prise au Kenya (robe rouge au centre), j’ai cadré en incluant trois « hors cadre ». En haut à gauche et en bas, dans le but d’éclater la composition… Pour les deux autres images, les éléments sortant du cadre sont le fruit du hasard. En street photo il faut donner sa chance au hasard.
Passons aux questions « graphiques »…
Les « rythmes »
En peinture, les rythmes sont des éléments essentiels et « récurrents »… Dans les plus anciens dessins rupestres, les artistes des cavernes dessinaient déjà des rythmes sous formes de traits régulièrement (ou irrégulièrement) espacés, ou de traces de mains superposées… On trouve des rythmes dans de nombreux éléments naturels ou artificiels, mais ils ne sont pas toujours visibles. Il suffit de se déplacer latéralement par rapport à son sujet pour les révéler.
Le « cadre dans le cadre »
La photo n’est qu’un cadre, une fenêtre sur autre chose, en somme. Inscrire un « cadre dans le cadre », on l’a tous déjà tenté, de façon plus ou moins subtile. Et ça marche assez bien, généralement. Le tout est de rechercher des cadres à travers lesquels placer son sujet. Mais créer des « cadres dans le cadre », ne dispense pas de trouver un sujet intéressant… Car le « cadre dans le cadre », n’est pas un sujet en lui-même.
Le « patern » (ou « patchwork« ) : accumulation de motifs répétitifs
Ici, on ne se situe presque plus dans le domaine de la photo, mais quasiment dans l’Art pictural… Parfois cela se borne à photographier (et à s’approprier), le travail d’un autre, trouvé sur un mur : c’est un peu ce qui est décevant chez les photographes spécialistes du « Street Art ». Cela reste un intéressant exercice de composition à tenter de temps en temps : cela permet d’affiner son « Art du cadrage »…
Le plus intéressant, c’est lorsque l’on réussi à faire apparaitre un « pattern », en photographiant un sujet qui doit tout au hasard. Encore faut-il que cela « raconte » quelque chose… Sinon, cela revient seulement à créer du « papier peint apocalyptique » (une expression parlante, que j’ai volé à un de mes profs d’Histoire de l’Art durant mes études)… L’effet « mosaïque », ou « patchwork » s’observe parfois dans la nature, parfois en ville…
Lire la suite : Prise de vue, quelques « figures imposées »…
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Sympa ce sujet, j’attends la suite :)
Elle arrive ! Demain, ou après demain…
La règle des tiers, c’est quand même bien de l’avoir pratiquée quelques temps. Comme ça, quand on l’oublie, on fait de bonnes photos tout en ayant en tête les réflexes de composition classique.
Comme toutes les règles : il faut d’abord apprendre la règle, puis comprendre la règle, puis dépasser la règle. Si on dépasse direct la règle, ça donne très très souvent des compos branlantes, qui manquent de structure, sans sens. (C’est pareil partout : pour être créatif et original il faut d’abord avoir une idée de ce qui est classique, pour dépasser le classique intelligemment.)
Et c’est bien aussi de ne pas se forcer artificiellement à respecter la règle. Peu importe si la compo est un poil décentrée par rapport à la règle des tiers, si la photo est plus naturelle.
Sinon, une alternative au « cadre », c’est plein d’éléments hors-champ qui dessinent le contour d’une photo. Surtout flous, ça donne un côté très immersif à l’image.
Bien dit !
Mais attend, la seconde partie… qui est en préparation (elle est plus riche encore)…
que des superbes photos, je crois que mon plus gros coup de coeur c’est celle au Myanmar. Faites au télé, ya 9 personnes /ombres sur la photo et pas une seule en se chevauche et tous le monde s’imbrique ! elle est assez folle.
sinon sur 98% de tes photos la règle des tiers est la ! et la règle c’est pas de mettre PILE à 1/3 de l’image. c’est de mettre grossièrement à 1/3. si c’est 1/4 c’est pareil. la règle des tiers c’est surtout de dire à à débutant : ne centre pas verticalement l’horizon et ne centre pas horizontalement un portrait.
On est d’accord ;-)
Oui, cette photo en Birmanie, c’est ma préférée des 3 dernières années…
Très utile cet article Jean-François, j’attends avec impatience la suite. Je lis les commentaires, et oui tes photos sont superbes, pour quelques unes je n’étais pas loin de toi et pourtant les miennes n’ont pas autant de force. Travailler, travailler, travailler encore…..
Merci , merci JF !
Celle-ci a moins de rythme, mais heureux de l’avoir faite tout de même , c’était un si beau moment…
J’adore celle en Birmanie avec que des ombres, elle est exceptionnelle
Merci , merci Philippe !
Excellent article sur la photo, comme dab!
Wow ! ça c’est de la photo ! J’aime surtout celle du Kenya
Merci pour ce très bon sujet de qualité… trop rare sur la toile.
Et oui, mais le tiers c’est bien pratique quand on est fainéant :D
Perso sur des travaux abstraits et graphiques, il peut m’arriver de la pousser à son paroxysme… par jeu
Merci !
La seconde partie est en ligne :
https://photoetmac.com/2018/05/prise-de-vue-quelques-figures-imposees-2-2/